De plus en plus d’hommes souhaitent pouvoir contrôler leur fertilité, mais à ce jour les options qui s’ouvrent à eux sont presque exclusivement résumées à deux possibilités: l’usage du préservatif, qui permet d’éviter des grossesses non désirées, ainsi que de mettre un frein aux maladies sexuellement transmissibles, et la vasectomie, une intervention drastique qui existe depuis le XVIIIe siècle. Il existe une troisième option peu fiable, qui serait le retrait (mais nous savons aujourd’hui que beaucoup d’enfants sont nés de cette méthode). Rien entre deux qui soit tout aussi efficace, pas une autre option moins invasive que la vasectomie, et moins rigoureuse que le préservatif, qui peut être encombrant pour les couples, et tout aussi fiable. Les méthodes contraceptives qui nécessitent la participation directe des hommes – stérilisation masculine, préservatif masculin et retrait – ne représentent en effet que 27,4% de la pratique contraceptive dans le monde, selon une étude publiée en 2019 par les Nations Unies.
Certains hommes souhaitent devenir maîtres de leur fertilité. Ils souhaitent ainsi éviter de mauvaises surprises et également soulager leur partenaire. Car certaines femmes ne tolèrent pas ou très mal, les méthodes courantes de contraception, telles que la pilule ou le stérilet. Il y a de ce fait une prise de conscience généralisée des effets secondaires des méthodes hormonales utilisées par les femmes. Ces effets, bien que rares, sont de plus en plus un sujet d’inquiétude dans une société qui vise à être plus saine et moins médicalisée. De plus, aucune méthode contraceptive féminine à ce jour ne donne une fiabilité à 100% contre une grossesse non désirée. Une barrière double serait désirable par certains couples sans devoir passer par des méthodes stérilisantes irréversibles.
En effet, depuis l’apparition de la pilule, la femme est devenue maîtresse de sa fertilité. Elle devient donc l’ultime responsable. Combien de fois avons-nous entendu, «si elle ne voulait pas d’enfants, elle n’avait qu’à se protéger!». La norme contraceptive entretenue depuis des décennies pèse sur les femmes. Pourtant, il faut être deux pour faire un enfant. «Cette norme enjoint les individus à utiliser le préservatif en début de relation, puis la pilule une fois que le couple se stabilise et enfin un dispositif intra-utérin, décrypte Mireille Le Guen, spécialiste des pratiques contraceptives à l’Institut national d’études démographiques en France. On passe donc d’un partage de la contraception – même si ce n’est pas toujours le cas dans les faits – à une responsabilité exclusivement féminine de la contraception». En effet, la femme, afin d’éviter une grossesse non désirée, va s’assurer d’utiliser les moyens à disposition, reposant ainsi sur ses épaules tout le poids de la contraception.
Des études récentes parlent de l’arrivée d’une pilule contraceptive pour les hommes https://www.medicalnewstoday.com/articles/safe-and-99-effective-birth-control-pill-for-men-may-soon-become-reality
Depuis des années, les recherches pour une pilule contraceptive masculine sont dirigées vers des méthodes qui contrôlent la testostérone, l’hormone sexuelle masculine. Son inhibition provoque des effets secondaires importants, tels que la prise de poids, la dépression et l’apparition de cholestérol. Ces effets sont trop sérieux pour considérer cette méthode comme applicable à grande échelle.
Cette nouvelle pilule non hormonale semble atteindre une efficacité de 99% chez les souris. Les chercheurs ont ciblé une protéine appelée récepteur alpha de l’acide rétinoïque (RAR-α). Cette protéine est impliquée dans la formation des spermatozoïdes et le développement embryonnaire. L’objectif était de trouver un médicament ne provoquant pas d’effets secondaires comme ceux observés lors de la prise de pilules hormonales. Cette pilule, administrée par voie orale à des souris mâles pendant 4 semaines, réduisait considérablement le nombre de spermatozoïdes et semblait prévenir dans 99% des cas une grossesse. Les souris étaient capables de retrouver leur fertilité et d’engendrer à nouveau environ 4 à 6 semaines après l’arrêt du composé. Ceci serait un pas en avant pour l’égalité homme-femme qui diviserait en deux la charge du contrôle de la fertilité dans le couple.
Conscients de la difficulté de ce défi, puisqu’un homme peut rester fertile même en perdant le 90% de sa capacité reproductive, il convient de rappeler qu’une des raisons principales à la lenteur du développement d’une pilule pour les hommes réside sur la haute efficacité de la pilule contraceptive féminine.
Il existe aussi un problème de normes sociales concernant la contraception masculine. Trop souvent en effet, les hommes associent leur masculinité (et leur «performance») à leur fertilité. Alors que l’un est complètement indépendant de l’autre. Afin que cette nouvelle pilule soit utilisée par les hommes de notre société, il serait temps d’éduquer les jeunes générations et leur donner la responsabilité de leur fertilité. Il est également primordial que les professionnels de la santé soutiennent ce changement de mentalité en parlant ouvertement de ces sujets avec leurs patients. Une grossesse est le résultat de l’action de deux individus, dont les deux doivent être tenus responsables.